- MONTÉNÉGRO
- MONTÉNÉGROMONTÉNÉGRAvec 13 812 kilomètres carrés, la république du Monténégro était la plus petite des républiques de la Fédération yougoslave créée en 1945 (5,4 p. 100 du territoire yougoslave), une des plus pauvres et la moins peuplée (44 hab./km2 en 1991). Constitué de moyennes montagnes (la plus haute, le Durmitor: 2 523 m au Bobotov Kuk) de calcaire silicieux, le Monténégro appartient à l’ensemble des Dinarides. Le climat est continental avec des hivers longs et rigoureux et des étés doux, méditerranéen sur la côte. Le recensement de 1991 fait état d’une population de 615 267 habitants, dont 61,84 p. 100 de Monténégrins, 1,02 p. 100 de Croates, 0,14 p. 100 de Macédoniens, 14,62 p. 100 de Musulmans, 0,07 p. 100 de Slovènes, 9,29 p. 100 de Serbes, 4,2 p. 100 de Yougoslaves, 6,64 p. 100 d’Albanais et 2,18 p. 100 d’autres nationalités. Le Monténégro s’est associé à la république de Serbie pour former, le 27 avril 1992, la république fédérale de Yougoslavie, permettant à celle-ci de bénéficier de 293,5 km de côtes. Bar est le principal port de commerce, Herceg-Novi et Kotor sont plus spécialisés dans les activités touristiques. Dans cette nouvelle association, le pouvoir politique du Monténégro reste limité, la république ne disposant que de 30 sièges sur 138 à la Chambre des citoyens du Parlement bicaméral. En raison de l’embargo imposé à la Serbie et au Monténégro depuis mai 1992, la crise économique frappe durement la population monténégrine. La baisse du niveau de vie incite les habitants à faire du marché noir. Les manifestations syndicales se multiplient, hostiles aux mesures prises par le gouvernement à la fin de l’année 1994 et destinées à geler salaires et retraites.L’histoire particulière du Monténégro confère à cette république une identité propre. Pendant longtemps, cette histoire se confond avec celle des Serbes, puisque aucune terminologie distinctive n’est utilisée. L’aire géographique occupée subit des modifications selon les époques. D’abord appelé Duklja, le Monténégro prit le nom de Zeta au XIe siècle et faisait partie de l’union avec le territoire serbe (Raška), union dans laquelle prédominait l’État serbe. L’appellation Crna Gora (Monténégro, littéralement Montagne noire), qui désignait un territoire différent de celui de l’actuelle république, fut utilisée pour la première fois sous le règne de Milutin (1282-1321), puis réapparut dans un traité en 1425 (entre Djuradj Brankovi が et Mle face="EU Caron" カi が). Connaissant de courtes périodes d’indépendance vis-à-vis de la tutelle serbe, le Monténégro devait passer sous administration ottomane en 1499. Peu de temps après cette date (1515), le pouvoir civil était représenté par un chef spirituel, le prince-évêque, élu par le peuple et qui siégeait à Cetinje. Un statut d’indépendance était conféré à la population. De 1696 à 1918, le prince-évêque était choisi dans la famille des Petrovi が, la charge passant d’oncle à neveu. Divisé en tribus (pleme ) et clans (bratstvo ), rétifs à la domination ottomane, les Monténégrins trouvèrent appui, selon les circonstances, auprès de Venise, de l’Autriche, et surtout auprès des Russes depuis le début du XVIIIe siècle. Un État moderne commença à se dessiner avec le règne de Petar Ier Petrovi が (1782-1830) qui, afin d’augmenter la puissance militaire contre les Turcs, essaya de réconcilier clans et tribus divisés par des conflits sanglants (vendettas). De 1830 à 1851, Petar II Petrovi が Njegoš, de la tribu Njeguši, succéda à son oncle. Evêque, philosophe et poète, il continua la construction politique commencée par son oncle, restructurant le régime qu’il dirigeait tout en lui conservant son caractère absolutiste d’antan. Son successeur, Danilo Ier (1851-1860), qui prit le titre de prince, laïcisa le système. Autonome, le Monténégro cherchait à se débarrasser de la tutelle d’Istanbul. De grandes révoltes eurent lieu en 1853 puis en 1857. Le prince Nikola (1860-1914) s’allia même à la Serbie pour soutenir la révolte paysanne de 1875-1876 en Bosnie-Herzégovine. Au congrès de Berlin de 1878, l’indépendance du Monténégro fut reconnue, et il retrouva un débouché sur la mer. Il participa aux deux guerres balkaniques (1912-1913) et agrandit sa superficie avec des territoires fraîchement libérés. En 1918, le Monténégro souverain accepta après un vote de s’intégrer au royaume des Serbes, Croates et Slovènes — qui deviendra royaume de Yougoslavie en 1929 —, sans pour cela faire l’unanimité: division entre les séparatistes (appelés les «Verts» à cause de la couleur du bulletin sur lequel étaient inscrits leurs candidats) et les partisans de l’union (les «Blancs», en raison de leur liste blanche). Les Verts s’opposèrent à cette union, à la disparition du royaume monténégrin et de la dynastie des Petrovi が, des traditions étatiques et de leur souveraineté, ainsi qu’à la domination de l’élite politique et militaire de Serbie. Cependant, ils furent battus par les Blancs, majoritaires, partisans de cette union. Tandis qu’il était occupé par les Italiens pendant la Seconde Guerre mondiale, des divergences divisèrent les Monténégrins, et de violents combats eurent lieu entre partisans titistes et défenseurs de la royauté serbe (tchetniks ). Dans la Fédération yougoslave créée par Tito, le peuple monténégrin devenait l’un des peuples constitutifs de la Yougoslavie. Podgorica (la future Titograd, qui a repris son nom depuis 1992) remplaça alors Cetinje comme capitale. Majoritairement orthodoxes à l’exception du Nord, peuplé de Musulmans (Sand face="EU Caron" ゼak), les Monténégrins ne disposent pas d’Église autocéphale et sont rattachés à l’Église serbe.Les grandes manifestations d’octobre 1988, qualifiées de «révolution antibureaucratique», n’ont finalement abouti qu’à un ravalement du pouvoir en place: le président du Monténégro, Momir Bulatovi が, chef du Parti socialiste démocratique (D.P.S.), héritier de la Ligue des communistes de Yougoslavie et proche de Slobodan Miloševi が, était favorable à une association d’États serbes. Soutenu par de petites formations (entre autres le Parti populaire et le Parti démocratique), le parti de Bulatovi が restait opposé à toute reconnaissance de la nation monténégrine et réaffirmait sa «serbité». Face à eux, une opposition favorable à l’indépendance totale du Monténégro dénonçait les irrégularités, les pressions et l’illégitimité même du référendum de mars 1992. Le débat des forces politiques monténégrines porte moins sur des questions idéologiques que sur la définition de la nation monténégrine. On retrouve au Monténégro les anciens clivages de 1918 entre les Verts et les Blancs. Pour les Blancs, la nation monténégrine n’existe pas. Le Monténégro représente la terre de ceux qui se sentent serbes, avec la même langue et la même religion. Le principal dirigeant du Parti populaire (N.S.), Novak Kilibarda, estime que la nation monténégrine est «une invention des communistes», résultat de manipulations, de spéculations régionales, reliquat de la dictature titiste. Pour lui, comme pour les Blancs en général, affirmer une identité monténégrine représente un acte antiserbe, et les sécessionnistes ne peuvent être que des traîtres.Complexe, la différence entre Serbes et Monténégrins fait appel à des critères à la fois historiques, religieux et linguistiques. Si les variantes dialectales sont ténues (les Monténégrins parlent majoritairement le štokavien jékavien et utilisent à l’écrit l’alphabet cyrillique), l’histoire a créé de fortes particularités au Monténégro, où dominent un sens particulier de l’honneur, le respect des anciens, le culte de l’héroïsme, la tradition guerrière, le sens de la parenté, du clan et de la tribu, valeurs qui imprègnent encore fortement la société monténégrine.Monténégro(en serbo-croate Crna Gora) rép. fédérée de Yougoslavie de 1945 à 1991, entre la Serbie, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie et l'Albanie; 13 812 km²; 620 000 hab.; cap. Podgorica.— La plaine littorale est dominée par les chaînes Dinariques. Princ. ressources: élevage ovin, oliviers, agrumes, bauxite, zinc, charbon.— Principauté ecclésiastique, le Monténégro résiste à l'emprise des Turcs. En 1910, avec Nicolas Ier, il s'agrandit grâce aux guerres balkaniques. En 1918, il s'unit à la Serbie et est bientôt inclus dans la Yougoslavie, dont il constitue une république fédérée à partir de 1945. Après la dislocation de la Yougoslavie (1991), les Monténégrins choisissent, par référendum, le maintien dans une structure fédérale et constituent le 27 avril 1992, avec la Serbie, une nouvelle Rép. fédérale de Yougoslavie.
Encyclopédie Universelle. 2012.